« Voici l'heure du discours de Rosa, son chant du cygne. Mais qu'a-t-elle donc ?
Tous regardent ce petit bout de femme. Ils la regardent avec amour et émotion,
même ceux qui ne sont pas d'accord avec elle. Ils savent qu'elle est la flamme
qui brûle pour eux depuis des décennies. Elle est à présent épuisée, fragile. La
prison l'a affaiblie. Elle parle, elle est dans son élément. Elle dit toute la
vérité. Karl Liebknecht est assis parmi les délégués. La voix de Rosa Luxemburg
résonne, claire et précise... » En dehors de Berlin Alexanderplatz, toute
l'oeuvre d'Alfred Döblin reste pratiquement à découvrir. Écrit en 1942 depuis un
exil dont l'auteur ne peut espérer la fin tant le nazisme semble triompher, Karl
et Rosa donne le dernier acte de l'évanouissement d'un espoir : que l'ordre
ancien disparaisse avec la fin de la Grande Guerre. Personnages historiques et
de fiction se croisent ici pour rendre le drame de l'écrasement de la révolution
spartakiste, prélude funeste au siècle qui commençait.