Qu'un écrivain aussi original, aussi peu suspect d'avoir subi des influences que
Henry Miller établisse une liste des livres qui, à quelque titre, ont aidé à la
formation de son esprit, il y a là, déjà, de quoi surprendre. On verra
d'ailleurs que cette liste est curieuse : D. H. Lawrence voisine avec Rider
Haggard (entre ce dernier et l'auteur de Nadja, Miller établit un curieux
parallèle), Lao-tseu avec G. A. Henry, auteur de romans historiques, le Gallois
John Cowper Powys avec Dostoïevski. Le lecteur français ne manquera pas d'être
flatté par la place importante donnée aux écrivains de son pays. On trouvera
dans ce livre les éloges les plus émouvants et les plus justes de Céline, de
Jean Giono, de Blaise Cendrars et de beaucoup d'autres. Mais ce livre n'est, en
aucune façon, un ouvrage de critique littéraire. Le recensement de ses lectures
est aussi, pour Miller, un prétexte à rechercher le temps perdu, à faire revivre
ses années d'enfance et de jeunesse, la vie théâtrale à New York au cours des
années 1900.