Autour des célèbres - s'il ne faut dire "légendaires" - Recherches sur l'essence
de la liberté humaine de 1809 sont ici rassemblés cinq autres textes
fondamentaux issus de la période "médiane" de la longue carrière philosophique
de Schelling. Des derniers contreforts de la philosophie de la nature et de la
philosophie dite "de l'identité", ils conduisent le lecteur, non sans contourner
la zone "turbulente" des Âges du monde, jusqu'aux abords de la dernière
philosophie. Parcours accidenté, paysage divers - étape problématique que ces
quinze années de mutation profonde et d'émancipation de la "philosophie
absolue", où la réussite radieuse de l'écrit sur la liberté (qui cependant
marque en même temps l'entrée de Schelling dans un silence définitif) n'a d'égal
pour la modernité que l'échec dramatique des Âges, cette tentative à la fois
historique et systématique de "narration" des aventures de l'absolu livré à sa
propre liberté "abyssale". Pourtant, si arbitraires que demeurent les découpages
chronologiques dans une oeuvre elle-même résolument aventurière, ce recueil peut
revendiquer une unité philosophique véritable : il la trouve précisément dans
cette "dis-jonction" qui, discrètement éclose dès les Aphorismes, puis déployée
tour à tour en sa structure dialectique et temporelle par les Recherches et les
Âges, ébranle le "système de la liberté" de Stuttgart avant de déchirer
décidément - ekstatiquement, dit Schelling - celui d'Erlangen, qui ouvre
lui-même sur la philosophie positive. En mettant ainsi en évidence l'endurance,
c'est-à-dire l'unité et la rigueur de l'entreprise schellingienne, ce livre
espère contribuer à effacer l'image mythique et tenace d'un philosophe
"romantique", voire "irrationaliste", et surtout, positivement, à rappeler que
la liberté "phénoménologique" que Schelling est le premier a avoir pressentie,
quel que soit l'acharnement des modes philosophiques à la frapper d'interdit,
n'en reste peut-être pas moins aujourd'hui, plus qu'un "thème", le problème
fondamental pour la pensée, pour peu que celle-ci ne se soustraie point à la
modernisation qui l'attend.