Avec ce livre-gigogne, c'est-à-dire reversible, chaque partie ayant sa
couverture : d'un côté Salut les anciens, de l'autre Salut les modernes, les
deux textes étant en quelque sorte imprimés tête-bêche, Christian Prigent renoue
avec sa veine d'essayiste et étudie du côté des anciens comme du côté des
modernes certains auteurs précurseurs ou tenants de la littérature que lui-même
illustre et préconise. Côté anciens : ce sont des lectures, des explications de
textes, dans des oeuvres anciennes, donc (de Lucrèce à Jarry, en passant par
Marot, Voiture, Balzac, Maupassant, Mallarmé, Rimbaud, Verlaine). Elles se
veulent un peu décalées, un peu décollées vers... autre chose (la fiction ? la
poésie ? l'aventure de la lettre ?). Elles s'appuient sur une conviction : que
les modernes ne sont pas les enfants des anciens mais que, plutôt, la perplexité
qui nous vient des modernes nous fait regarder les anciens d'un oeil moins tué
d'indifférence - qu'ainsi nous pouvons les réenfanter : les rendre à
l'inquiétude de la vie. Côté modernes, pour commencer, cette question : où est
dans la poésie d'aujourd'hui, le nouveau ? Bien présomptueux serait celui qui
prétendrait le savoir. On ne peut faire mieux que s'alerter (question d'oreille)
du phénomène de l'invention. Voici quelques écrits poétiques, récemment parus.
D'une certaine manière ils font "école". Une étrangeté coriace s'y affirme - qui
défie la lecture. Des noms ? Philippe Beck, Charles Pennequin, Christophe
Tarkos. Ces noms ne couvrent pas le champ. Leurs écrits ont simplement donné à
Christian Prigent un peu plus fortement que d'autres la sensation d'un phénomène
nouveau. Affaire de goût et d'affinités. Dans la différence, aussi bien -
éventuellement violente. D'où, adressées à eux, quelques remarques et quelques
questions.